À chaque fois qu’il rentre chez lui à Saint-Légier, Sébastien Buemi profite à fond du temps passé en famille: «Quand je rentre, c’est la fête à chaque fois.» | DR
Vous venez de décrocher le titre de champion du monde des constructeurs grâce à une folle remontée aux Huit Heures de Bahreïn. Racontez-nous.
– Dans ces courses, nous sommes toujours trois à piloter. J’ai roulé les deux premières heures, puis j’ai pris le dernier relais. À 1h20 de la fin, je ne pointais qu’en 10e position, puis j’ai dépassé tout le monde et j’ai fini avec 30 secondes d’avance. Je suis très content sur ce coup-là, mais cette victoire est aussi due à notre bonne gestion des pneus, si cruciale en Endurance. Sur la fin, les nôtres étaient moins usés que ceux des autres. Sur ce circuit, on fait des pointes à 310 km/h.
Autre motif de fierté: Max Verstappen a été sacré le week-end dernier champion du monde de F1 avec Red Bull pour la quatrième fois et vous êtes l’un des pilotes d’essai de l’écurie. Vous y êtes donc un peu pour quelque chose, non?
– Il faut relativiser. En amont de ce titre, il y a près de 2’000 personnes qui travaillent. Depuis l’instauration du budget cap – la limite des 130 millions imposée aux écuries afin d’égaliser les chances –, le développement technologique est encore plus pointu. Chez Red Bull, nous sommes deux pilotes d’essai. Au siège situé au nord de Londres, je roule dans un simulateur qui restitue au dixième près les conditions d’un circuit. Là-bas, on procède à des analyses et on invente de nouvelles pièces.
Max Verstappen, vous le connaissez?
– Oui, depuis une bonne dizaine d’années. Être sacré quatre fois en F1, alors qu’il n’a que 27 ans, est exceptionnel. Même s’il est difficile de comparer les époques, Max est selon moi, sur le plan technique, le plus grand pilote de tous les temps. Et puis, même s’il gagne beaucoup d’argent, s’il voyage en jet privé, il reste le même. Un type ouvert et très abordable.
Très polyvalent, vous avez été en 2016 champion du monde des Formules E, les monoplaces électriques, et continuez à aligner les virages dans cette catégorie. Vous aimez?
– Beaucoup. Les courses ont lieu au centre des plus grandes villes et on roule à 280 km/h en frôlant les immeubles. C’est chaque fois un gros challenge. J’ai un faible pour les circuits de New York et Tokyo. Je garde également un souvenir à part de la course de Berne en 2019 où j’étais monté sur le podium.
Quels sont jusqu’ici les moments les plus forts de votre carrière?
– Mes quatre succès aux 24h du Mans, un mythe! Et aussi mes débuts en F1, à Melbourne en 2009, où j’avais fini 7e. C’était mon rêve de gosse qui se réalisait.
Vous avez commencé le karting à 6 ans et vous êtes professionnel depuis vingt ans.
La passion reste intacte après toutes ces années?
– Le sport automobile comprend plein de paramètres: le marketing, le travail avec les ingénieurs, etc. Cela fait partie du job. Mais ce que je continue à aimer par-dessus tout, c’est le ressenti de la vitesse et rouler avec des machines qui n’existent pas dans la vraie vie. Je me réjouis de chaque départ comme à mes débuts. Et puis je suis un compétiteur, j’aime me battre, gagner.
Vous avez trois petits garçons, Jules (8 ans), Théo (6 ans) et Hugo (19 mois). Vous êtes toujours aux quatre coins du monde, ils ne vous manquent pas?
– Quand je suis là, comme ces jours-ci, je suis vraiment là. Mes deux aînés, je les amène à l’école et à leurs différentes activités et je vais les rechercher. Quand je rentre, c’est la fête à chaque fois et ça compense un peu. Jennifer, mon épouse, infirmière en pédiatrie, est habituée à cette vie-là.
Les plus grands font du karting?
– Oui, sur un petit circuit aménagé autour du garage familial à Aigle et sur celui de Vuiteboeuf où je les emmène parfois. Ils adorent ça. Le problème avec le karting, c’est qu’il faut toujours être avec eux. Vous ne pouvez pas comme dans d’autres sports leur acheter une paire de godasses et les laisser seuls. Jules et Théo font aussi du tennis, et du foot avec le FC Saint-Légier.
Jeune papa, vous n’avez pas peur de l’accident?
– Si vous commencez à avoir peur en sport automobile, c’est fini. Vous oubliez. Pilote, c’est mon métier et je sais ce que je fais. Les risques que je prends sont calculés, même si un accident peut arriver. Toutefois, l’époque où il y avait 4-5 morts chaque saison sur les circuits est révolue. La sécurité s’est bien améliorée.
Quel est votre attachement à la région?
– Je l’adore! Je vis à Saint-Légier, j’ai un bateau sur le lac, un chalet à Villars. Moi qui me promène partout dans le monde, je peux vous dire que la Suisse, c’est vraiment pas mal.
À 36 ans, comment voyez-vous l’après carrière?
– J’espère piloter au moins jusqu’à 40 ans. À côté, je suis concessionnaire VW à Aigle et j’ai investi dans l’immobilier. J’ai besoin d’avoir des projets en ligne de mire, d’être actif. Un après-midi à la plage, ça me suffit… Ma femme me répète souvent que je devrais m’arrêter un peu.
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