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Le trou de couverture mobile agace et interroge

La coupure du réseau mobile, via l’antenne d’Attalens initialement annoncée au 19 décembre, sera plutôt effective en janvier.  | C. Dervey

Téléphonie
Une partie du territoire d’Attalens, de Jongny et du Mont-Pèlerin pourrait se retrouver dans une situation rarissime en Suisse dès le 12 janvier: une absence de réseau mobile Swisscom à l’intérieur des bâtiments.

L’annonce, transmise par courrier aux clients de Swisscom, a provoqué une onde de choc. «Je ne comprends pas qu’ils n’aient pas pris les mesures nécessaires en temps utile. Il existe pourtant d’autres points suffisamment élevés où installer une antenne sans déranger personne!», s’offusque Renée*, retraitée attalensoise.

Dans cette commune de la Veveyse, nombreux sont ceux qui disent avoir tenté d’obtenir des explications plus précises concernant la désactivation imminente de l’antenne installée dans le clocher de l’église d’Attalens. Cet arrêt est consécutif à la résiliation du contrat entre la paroisse et l’opérateur.
La coupure, initialement annoncée au 19 décembre, sera plutôt effective «aux alentours du 12 janvier», nous informe la paroisse.

Un arrêt du jour au lendemain?

Sur le terrain, les réactions oscillent entre incertitude et agacement face au manque d’informations sur les conséquences concrètes. «Nous avons juste reçu une lettre. Le délai est extrêmement court, déplore Claire*, jeune maman. Je me suis même demandé s’ils allaient en parler au téléjournal. Il n’y a aucune information claire, je trouve aussi que la Commune aurait pu communiquer, même si cette situation relève du domaine privé.»

Des commerçants s’interrogent également. «Si nos appareils ne fonctionnent pas correctement via le Wi-Fi, il faudra réinvestir. Et comment les clients vont-ils payer? Cartes, Twint, e-banking… tout repose sur le réseau, s’inquiète Josiane*, qui a appris la situation via les réseaux sociaux. Dès que les lettres sont arrivées, ça a vraiment fait du bruit. On verra bien si, du jour au lendemain, on tombe dans le néant et qu’on n’a plus rien!» (rires)

Quant à Pierre*, un autre commerçant, il ne décolère pas: «Personnellement, je suis fâché. Aujourd’hui, on ne peut même pas dire si la situation sera réellement problématique ou non. Nous n’avons été informés ni en tant que commerçants ni comme particuliers. Et être prévenus à peine un mois à l’avance, alors que le dossier est discuté depuis des années? Je trouve cela inadmissible!»

D’autres relativisent, sans masquer leur malaise. «Tant qu’on a du Wi-Fi, ça va. Mais sans 4G, faire des paiements devient vite compliqué, observe Georges*, graphiste. Ce qui choque surtout, c’est qu’on savait depuis 2017. Swisscom a eu huit ans pour agir et n’a rien fait.» Autant de questionnements qui illustrent une certaine confusion devant une échéance qui ressemble à un couperet.

Rupture annoncée de longue date

L’origine du conflit remonte à 2009, lorsque le Conseil paroissial avait accepté l’installation de l’antenne. En 2017, constatant que Swisscom procédait ailleurs dans le canton à des modifications de ses infrastructures sans mise à l’enquête, la paroisse résilie le contrat, huit ans avant son échéance.

Les craintes se confirment en août 2021, lorsque l’opérateur téléphonique transforme l’installation pour qu’elle soit compatible à la 5G, sans notification ni procédure préalable de mise à l’enquête. Cette situation conforte la paroisse dans sa décision, réitérée en 2024.

Par principe de précaution, le Conseil paroissial refuse d’assumer la responsabilité d’une antenne 5G à proximité immédiate d’une crèche, d’une maternelle et d’une école primaire. Le contrat prévoyant un préavis de deux ans, Swisscom disposait d’un délai largement suffisant pour anticiper une solution alternative.

Un impact encore incertain

De son côté, Swisscom confirme la coupure en indiquant qu’un projet alternatif est à l’étude, mais qui pourrait bien prendre plusieurs mois, notamment en cas d’oppositions. Concrètement, les appels et la data mobile deviendront très aléatoires à l’intérieur des logements. À l’extérieur, une couverture partielle subsistera grâce aux basses fréquences 4G et 5G, mais l’opérateur reconnaît que les usages gourmands en données et la gestion du trafic seront compliqués.

Interrogé devant l’église, Thierry*, qui dit avoir pris le temps de se renseigner, nuance toutefois: «Les gens ont été un peu affolés par l’annonce, avec l’impression que tout va s’arrêter. Or l’impact réel pourrait être moins important que prévu. Des chevauchements de réseaux existent déjà, et certains habitants captent de la 5G provenant d’autres antennes. À Châtel-Saint-Denis, par exemple, des antennes situées dans l’église sont régulièrement coupées en semaine pour des travaux sans que la population ne s’en aperçoive, la couverture étant assurée par d’autres installations.» Selon ce passant, «Attalens ne tombera pas dans un vide numérique total, même si certains bâtiments mal situés pourraient rencontrer des difficultés ponctuelles».

En attendant, les résidents d’Attalens et des environs s’apprêtent à vivre une situation ubuesque, symbole d’un paradoxe suisse: dans l’un des pays les mieux connectés au monde, plusieurs milliers d’habitants devront, pour un temps indéterminé, s’adapter à un réseau mobile devenu incertain.

* Prénoms d’emprunt