
Situé à quelques pas de la gare, le guichet postal de Montreux 1 occupait le rez de cet immeuble. Il a cessé son activité en 2023. | R. Brousoz
Tchac-tchac, tchac-tchac… Pendant longtemps, ces endroits ont vécu au rythme des coups de tampon postal. Souvenir de cette époque où l’on faisait la queue avec le fameux livret jaune à la main. Où l’on s’acquittait encore de nos factures face à un être humain. Mais depuis le début des années 2000, les offices de poste disparaissent les uns après les autres, laissant derrière eux des locaux vides et silencieux. Jusqu’à ce qu’un jour, la vie reprenne ses droits…
«Parfois, il y a des gens qui entrent avec un paquet sous le bras et qui me demandent si la poste n’est pas ici», s’amuse Sandra Desarzens. Et pour cause, le local que cette potière occupe à l’étage de la gare d’Ollon était jadis la filiale boyarde, dont l’annonce de fermeture en 2016 avait suscité une bruyante mobilisation. En vain. Depuis, la surface a été rachetée par les Transports Publics du Chablais (TPC), qui la loue donc à la céramiste. Cette dernière est à la tête de l’atelier Ficelle, où se succèdent cours de poterie pour petits et grands, ainsi que des consultations d’art-thérapie.
De sa vie d’avant, le local a gardé les vitres de l’ancien guichet. Et l’âme postière plane encore sur les activités proposées aux enfants. «Il y a tellement eu d’envois ici, on s’en sert comme support de créations, explique Sandra Desarzens. On joue à la poste, en inventant des timbres, en faisant des envois fictifs.» Un thème qui lui semblait tout naturel. «Pendant 18 ans, mon atelier était à l’étage au-dessous, à côté des voies. Et là, le thème tournait plutôt autour des trains», sourit-elle.
Tambours et fers à repasser
Autre lieu, autre ambiance. Depuis juillet 2024, l’ancienne poste de Gryon ronronne au bruit des machines à laver et des repasseuses. Après le rachat du bâtiment par la Commune pour 700’000 francs en 2018 – deux appartements étant compris dans le lot – la surface abrite désormais la «Blanchisserie des Alpes». Saisonniers du domaine skiable, personnel des restaurants ou draperies des appartements de vacances: c’est ici que sont nettoyées des montagnes de linges et autres tenues de travail. «Nous lavons actuellement environ une tonne et demie par semaine», indique la gérante Mafalda Paiva.
Comme souvent, le passé n’est pas complètement effacé. Ici une porte blindée, là un comptoir. L’affectation historique permet même un «marketing subtil». «Pour indiquer l’adresse à nos clients, il suffit de leur dire qu’on se trouve à l’ancienne poste!» Avec un service de location de linge de sa propre marque et des collaborations en vue avec des grandes entreprises de la région, la petite blanchisserie gryonnaise – qui emploie deux personnes – ne manque pas de projets.
Du « bunker » à la garderie
À Roche, ce sont les rires – et les pleurs – d’enfants qui vont ranimer ce qui fut autrefois le bureau postal. Cet endroit est en passe de devenir la première garderie du village chablaisien. Dès janvier 2026, elle devrait accueillir une quarantaine de bambins. Pour l’heure, ce sont surtout les outils de chantier qui se font entendre. «Nous avons dû repenser les pièces, ça ressemblait plus à un bunker qu’à une crèche», dit le municipal Julien Cattin. Des travaux dont la facture avoisine 1,3 million de francs.
Ici aussi, le bâtiment – qui n’a qu’un seul niveau – a été racheté par la Commune lorsque le géant jaune l’a déserté en 2019. Coût de l’acquisition: 370’000 francs. Il est resté inoccupé depuis cette date. «Pour nous, c’était un bien désaffecté tombé dans l’escarcelle communale, explique l’édile. Et c’est un peu à la surprise de tout le monde que l’idée d’une garderie est apparue ces dernières années.» Un endroit qui promet selon lui d’être «magique» de par sa situation centrale et son accès «par toboggan» au grand verger communal.
Place aux combats
Ici, pas de toboggan. Mais un vaste tatami et des sacs de frappe. Depuis sa fermeture en avril 2023, la filiale de Montreux – située à quelques pas de la gare – a été transformée en temple du coup de pied et de la clé de bras. Sur les murs, le jaune postal a été remplacé par un blanc épuré. «Il s’agit de favoriser la concentration», explique Jovica Tomic, qui y a ouvert son académie d’arts martiaux en novembre dernier.
«C’est un rêve que j’avais depuis une dizaine d’années», explique cet ancien professionnel de MMA, champion d’Europe de jiu-jitsu brésilien. «Un jour par hasard, je me suis arrêté au kiosque voisin et j’ai remarqué que l’office n’y était plus. J’ai contacté La Poste et je leur ai parlé de mon projet.» Après d’importants travaux où il a fallu «enlever des vitres blindées», celui qui a grandi à Clarens a donc lancé «Vision of Martial Arts» (VMA).
L’endroit se situe au rez-de-chaussée d’un imposant bâtiment de trois étages datant des années 1930. Contrairement aux cas cités plus haut, La Poste est encore propriétaire du local. Quel loyer le fondateur de VMA verse-t-il à l’ancienne régie fédérale? «Confidentiel», nous répond-il.
Doté d’un espace de préparation physique et de remise en forme, l’endroit accueille près de 200 sportifs de tous âges et tous niveaux. Une association doit aussi permettre d’encadrer les compétiteurs émergents, qui brillent en MMA, jiu-jitsu brésilien, grappling (lutte au sol) ou boxe anglaise. «Nous avons une douzaine de jeunes qui ont un potentiel incroyable», s’enthousiasme Jovica Tomic. Ou quand les coups de poings succèdent aux coups de tampons.
«Au cours des cinq dernières années, La Poste a vendu une centaine de biens immobiliers dans tout le pays», indique Corinne Tschanz, porte-parole du géant jaune pour la Suisse romande. «Il s’agissait principalement de locaux en PPE qui abritaient auparavant des offices postaux.» Que ce soit à travers les ventes ou les locations, nous aurions voulu connaître ce que représentaient les montants engrangés grâce à ces activités immobilières. Mais à ce sujet, La Poste préfère rester discrète. «Le marché immobilier est très dynamique, explique sa communicante. C’est pour cette raison que l’entreprise ne publie pas de détails sur sa stratégie immobilière ou des informations spécifiques qui n’ont pas été publiées dans le rapport annuel.» Quant à savoir si la location des surfaces commerciales est plus rentable que le maintien des offices, nous nous sommes heurtés à la même réponse.
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