Une première BD qui laisse sans voix

Quand Damien Leuba était petit, c’était lui le «topio», comme l’appelait affectueusement son grand-père. «Il aimait bien m’appeler aussi <triple buse>, mais comme prénom de héros de BD, ça sonne moins bien», plaisante celui qui devient Dam une fois qu’il a revêtu sa casquette de dessinateur.

Qui plus est, un mot bien vaudois s’imposait pour le personnage de son premier ouvrage, dont la mission est de faire revivre une histoire typique de nos contrées: «Topio, la légende d’Hutzêran», édité par la maison Jobé-Truffer à Montreux, sort cette semaine en librairie. 

Une fierté pour le Veveysan de 32 ans qui a grandi dans le Nord vaudois. «Un rêve d’enfant qui se réalise», renchérit-il, en extrayant un exemplaire d’un carton d’où émane une odeur d’encre fraîche.

Son coup de crayon ne vous sera peut-être pas inconnu, puisque le Veveysan exprime chaque semaine son talent d’illustrateur en page 2 du Riviera Chablais Hebdo. Dessin de presse ou BD, les deux ingrédients principaux restent les mêmes: un style cartoon et un humour incisif, celui qu’il emprunte à ses sources d’inspiration Alexandre Astier («Kaamelott»), Michel Audiard ou Bertrand Blier. 

«J’ai voulu un livre à double lecture, qui s’adresse à la jeunesse, mais qui parle aussi aux adultes, avec des références que les plus jeunes ne relèveront pas, précise l’auteur. J’ai opté pour un langage très parlé, avec pas mal d’argot et des références à la pop culture. Le but final est que tous se réintéressent aux histoires de chez nous.» Soit l’une ou l’autre de celles recensées par Alfred Cérésole dans son livre «Légendes des Alpes vaudoises» (1885).

Une ambiance médiévale

Topio, commis de l’herboriste Aulm, parviendra-t-il à retrouver la voix perdue (volée même!) du barde, afin que celui-ci puisse officier lors de la traditionnelle fête des bolets? Pour cela, il lui faudra affronter moults dangers pour trouver du sisymbre, «la plante des chanteurs». «J’adore la nature et l’herboristerie – avec un faible pour les champignons! – et je me suis basé sur de vraies plantes, même si, là aussi, j’ai pris des libertés.»

Au fil des pages épaisses et des cases aux couleurs vives, le lecteur ne (re)découvrira pas un conte, mais trois, en se baladant à travers le Pays de Vô (dont la carte imaginaire de Dam figure en annexe). Il voyagera de Vey, cité en bord de lac, puis le long d’arêtes de montagne aux contours familiers, en passant par une grotte aux fées. «Les noms de lieux sont inventés, pour ne pas être trop réalistes et me laisser une liberté artistique totale, mais tous seront facilement identifiables», explique Dam. Idem pour la temporalité, même si l’inspiration médiévale est évidente et le monde de J.R.R. Tolkien («Le Seigneur des Anneaux») jamais très loin.

Au chapitre du financement, Damien Leuba a pu compter sur le bon résultat du financement participatif levé l’an dernier. «Je visais 4’000 francs, j’en ai obtenu 8’500. La personne qui a donné 500 francs a demandé à apparaître dans la BD sous la forme d’un personnage.» En cherchant bien, vous trouverez également «IPA», le chien de Dam!

Un tome 2 en 2027?

En tout, mille exemplaires sont arrivés vendredi de République tchèque où ils ont été imprimés. Les premiers d’une aventure que Damien Leuba espère voir se décliner à l’infini, les légendes vaudoises lui offrant une matière gigantesque. 

«Pour l’heure, je vais enchaîner les dédicaces de ce premier épisode et attendre les retours. Mais j’ai déjà des scénarios en tête, les idées claires sur certaines choses que je vais faire différemment pour le prochain, et l’envie de me remettre à dessiner dès la fin de cette année pour une éventuelle sortie d’un tome 2 en 2027.»

www.damienleuba.ch

«Topio, la légende d’Hutzêran», éd. Jobé-Truffer, 60 pages, 29,90 francs, dans toutes les librairies. Première dédicace ce samedi à Payot Lausanne (10h30-12h30). À Payot Vevey, le 6 décembre (dès 14h).